LE REFERERENDUM SOUS LA V REPUBLIQUE ou L'AMBIVALENCE D'UNE INSTITUTION

 

 

 

      Cet article a été publié par "Les petites affiches " le 13 novembre 1998 dans son numéro 136, pages ( 4 à 5)

 

 

            Depuis quelques mois, de nombreuses propositions visant à organiser un référendum ont vu le jour. Qu’il s’agisse de la loi sur la nationalité, du Traité d’Amsterdam, du problème du cumul des mandats, de la parité homme-femme voire de la modernisation de la vie politique. Aucune n’a abouti ou n’a vraiment de chance d’aboutir. Pourtant, en 1995 la Constitution a été révisée en vue d’élargir le domaine du référendum et certains parlaient déjà d’une “banalisation” du référendum [1] . On en est loin, et l’on pourrait même être tenté de dire que le référendum est à nouveau tombé en désuétude, comme cela a déjà été le cas sous la Ve qui  pourtant l’a fait renaître de ses cendres [2] .

 

             Le référendum est apparu en France  avec la République. La Constitution de l’an I a non seulement été adoptée par le peuple lui-même mais avait prévu  la possibilité pour le peuple de s’opposer aux lois proposées par le Corps législatif -  le veto législatif - dans ce cas un référendum était organisé [3] .Si les Conventionnels ont choisi le référendum, c’est parce qu’ils ont construit leur Constitution autour de la notion de Souveraineté populaire et non nationale. Un tel choix débouche sur la démocratie sinon directe du moins semi-directe puisque c'est le peuple réel – la population – qui est titulaire  de la Souveraineté. D’ailleurs, dans cette même Constitution le peuple disposait également du droit d’initiative en matière de révision constitutionnelle [4] . L’apparition du référendum dans nos institutions intervient donc dans le cadre de la démocratie semi-directe comme l’un de ses instruments. Toutefois, comme la Constitution de l’an I ne sera pas appliquée, le référendum sera sanctuarisé [5] .

 

            Certes les deux constitutions suivantes seront à leur tour ratifiées par le peuple [6] . Mais, avec l’instauration du césarisme napoléonien notre histoire constitutionnelle va découvrir un avatar du référendum : le plébiscite. Non prévus par la Constitution, les plébiscites permettent à Napoléon BONAPARTE de consolider son pouvoir. Une première fois, en l’an X, le peuple confirmera le passage du Consulat au Consulat à vie. Une deuxième fois, en l’an XII, le peuple approuvera la transformation du Consulat en Empire. La nouvelle forme du référendum permet donc à un homme au pouvoir, d’élargir ce pouvoir et de le légitimer. C'est un vote non pas sur un texte, comme les apparences le laissent croire, mais bien sur un homme, sans qu’il n’ait d’adversaires.

 

            Louis-Napoléon BONAPARTE comprendra tout l’intérêt d’une telle procédure et après son coup d’Etat du 2 décembre 1851, il fera confirmer son action par le peuple les 20-21 décembre 1851, puis, un an plus tard, les 21-22 novembre 1852 il fera approuver le rétablissement de l’Empire.

 

            C'est le général de GAULLE qui réintroduira le référendum en 1945. La IVe République en sortira péniblement aux termes de deux autres référendums constituants. Mais, jamais cette République n’organisera de référendum qui pourtant était possible pour réviser la Constitution.

 

            Il faudra attendre le retour du général de GAULLE en 1958, pour voir le référendum à nouveau inscrit dans la Constitution. C'est sous l’influence de René CAPITANT [7] , reprenant la démarche de CARREde MALBERG [8] que le référendum fut réhabilité. S’il le fut, c'est parce qu’il pouvait devenir un “correctif des tendances ultra-représentatives du régime parlementaire” [9] . Cette idée sera d’abord exprimée en termes généraux dans l’article 3 de la Constitution : “ la souveraineté appartient au peuple français qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum ”. Puis elle sera déclinée sur plusieurs modes, ce qui se traduira par plusieurs types de référendum : d’abord le référendum législatif dans l’article 11, puis le référendum constituant dans l’article 89 et même, accessoirement le référendum d’autodétermination dans l’article 53.

 Toutefois, le référendum n’échappera pas à ce qui semble être son destin en France, il se transformera en plébiscite. L’autre face du référendum devait en effet rapidement apparaître, soulignant ainsi l’ambivalence de l’institution. [10]

              Conçu au départ comme un tempérament au régime représentatif ( I ), le référendum devait devenir un instrument de la présidentialisation du régime ( II ).

 

 

 

I - LE REFERENDUM, TEMPÉRAMENT AU RÉGIME REPRÉSENTATIF

           

            En permettant l’intervention directe du peuple dans le champ législatif et dans le champ constitutionnel, le référendum deviendra un tempérament au caractère représentatif du régime.

 

            A) L'intervention du peuple dans le champ législatif

           

            Avec la Constitution de 1958 et son article 11 le peuple peut adopter des lois au même titre que le Parlement. Certes cette intervention du peuple dans le champ législatif est limitée par celle des gouvernants : le référendum dépend en effet de leur action préalable. Mais l’intervention du peuple dans le champ législatif est également limitée par le domaine qui lui est ouvert.  

a - Une intervention limitée par les gouvernants

           

            Les gouvernants sont à l’origine du référendum.  Quelques tentatives en vue de dépasser  cette situation n’ont pas vraiment réussi.

 

1 -  L’ampleur de l’action des gouvernants

C’est d’abord, et c’est surtout l’exécutif qui peut déclencher la procédure, puisqu’il dispose  du pouvoir d’initiative et du pouvoir de décision .

      L’initiative revient au Gouvernement collégialement, et non pas au Premier ministre, comme prévu initialement. Cela revient à dire que c’est en Conseil des Ministres que la proposition de référendum est faite. C’est en tout cas la pratique qui s’est imposée. D’abord, comme l’explique Gérard CONAC [11] parce que c’est sur un projet de loi que porte la proposition de référendum. Or les projets de lois sont délibérés en Conseil des Ministres selon l’article 39. Ainsi  on simplifie la procédure. D’autre part cette formule a l’avantage toujours selon le même auteur de permettre aux différents ministres de se prononcer sur la question. Mais bien sûr rien n’interdit au Gouvernement de se réunir hors la présence du Président de la République pour discuter de la proposition. C’est vraisemblablement la formule qui serait adoptée à l’heure actuelle. Toutefois, c’est en Conseil des Ministres qu’ultérieurement serait discuté le projet de loi.

 

 Mais la proposition de référendum est limitée dans le temps puisqu’elle ne peut être faite que pendant les sessions parlementaires. Cette limitation n’est pas très sévère, c’est plutôt la possibilité pour le Parlement d’agir qui constitue une limite.

 

Enfin, cette proposition de référendum a souvent été des plus formelles. Le général de GAULLE et Georges POMPIDOU, annonçaient aux français leurs intentions référendaires avant la proposition officielle du Gouvernement. Par cette pratique le Président “s’octroie… un pouvoir entier” [12] . Bien sûr cela résulte de la subordination politique du Premier ministre que fait naître la concordance des majorités. En période de cohabitation, il en va autrement, la lettre de la Constitution est alors respectée et l’initiative gouvernementale conditionne la décision présidentielle.

 

 

Depuis 1958, le Président de la République a toujours disposé et de l’initiative et de la décision. La seule exception est celle du référendum sur la Nouvelle-Calédonie qualifié justement de “ référendum d’initiative gouvernementale ” par Jean GICQUEL [13] . A l’époque, il n’y avait certes pas cohabitation, mais la position du Président de la République était affaiblie par l’existence d’une majorité relative à l’Assemblée Nationale. Le Gouvernement n’est pas le seul à disposer d’un tel pouvoir.

 

Le Parlement peut en effet, non seulement, partager l’initiative mais aussi contrôler celle du Gouvernement.

           

Le partage de l’initiative entre le Parlement et le Gouvernement semble se situer sur un plan d’égalité. Or, il n’en est rien. D’abord, la proposition doit émaner conjointement des deux assemblées, ce qui rend les choses plus difficiles. Mais surtout, l’initiative parlementaire “ ne peut s’exercer que sur texte émanant du Gouvernement ” [14] , c’est à dire un projet de loi. La symétrie n’est donc qu’apparente [15] .

 

Tout cela explique sans doute le fait qu’aucun référendum n’ait été organisé à la suite d’une telle intervention. En réalité il semble que les constituants aient voulu “ rassurer ” le Parlement en montrant que le référendum n’était pas conçu comme une machine de guerre contre lui, mais plutôt comme une technique parmi d'autres d'élaboration de la loi. Aucune technique n’excluant le Parlement.

 

C’est dans le même esprit que l’article 11 prévoit la possibilité pour le Parlement de contrôler l’initiative gouvernementale. Ce contrôle résulte de deux dispositions.

 

D’abord, dans la mesure où l’initiative gouvernementale ne peut être prise que pendant la durée des sessions, il est possible aux parlementaires de s’opposer à celle-ci. Soit en émettant des réserves qui politiquement peuvent être d’un certain poids, soit, à l’Assemblée Nationale, du moins, en déposant une motion de censure. En période de cohabitation, l’une ou l’autre chambre peut aussi, en soutenant l’initiative gouvernementale, faire pression sur le Président de la République. En réalité, ces possibilités n’ont jamais été mises à profit. Le fait que l’initiative gouvernementale ne puisse être prise que pendant la durée des sessions est plutôt inspiré par les préoccupations déjà citées, à savoir, la volonté de ne pas froisser les parlementaires, en  les plaçant devant le fait accompli.

 

C’est sans doute dans cet esprit que les parlementaires eux-mêmes, lors de la révision de l’article 11 intervenue en 1995, ont tenu à introduire une nouvelle disposition par laquelle : “ Lorsque le référendum est organisé sur proposition du Gouvernement, celui-ci fait devant chaque assemblée, une déclaration qui est suivie d’un débat ” [16] .

 

Ce débat, qui était déjà possible auparavant, devient  obligatoire [17] . Ainsi non seulement le Parlement est-il associé à la procédure référendaire, mais il peut toujours et plus systématiquement soutenir le référendum ou s’opposer à lui. La “ reparlementarisation ” [18] des débats référendaires  ainsi espérée est donc des plus relatives.

 

 

 

L’intervention du peuple dans le champ législatif est bien limitée par l’action des différents pouvoirs constitués. Certes, ils peuvent se neutraliser réciproquement. A cet égard, c’est durant la cohabitation que l’équilibre est le plus grand. Mais le plus souvent, c’est le Président de la République qui maîtrise la procédure. Quelques tentatives en vue de dépasser cette situation ont bien été tentées.  

 

 2 - Les tentatives de remise en cause de l’action des gouvernants

 

 

            Deux sortes de tentatives ont vu le jour. D’une part, celles qui visaient à encadrer l’action des gouvernants par le biais du Conseil Constitutionnel. D’autre part, et plus radicalement, celles qui cherchaient à substituer les gouvernés aux gouvernants en instaurant le référendum d’initiative populaire.

 

            Le Conseil Constitutionnel peut en effet, encadrer l’action des pouvoirs publics dans le déclenchement du référendum, au travers de sa consultation.

 

            Elle est prévue par l’article 46 de l’ordonnance du 7 novembre 1958. Mais il ne s’agit que d’une consultation “sur l’organisation des opérations de référendum ”. Or il ne semble pas qu’ainsi le problème de la constitutionnalité du référendum puisse être soulevé. De plus, cet avis n’a qu’une valeur consultative, et n’est pas publié.

 

            Aussi, à l’occasion de la révision de 1995, Louis FAVOREU, auditionné par la Commission des lois constitutionnelles de l’Assemblée Nationale a-t-il proposé qu’un “avis public et motivé ” soit rendu par le Conseil. Cet avis portant notamment sur la constitutionnalité du projet [19] .

 

            D’autres propositions allant plus loin, avaient déjà été faites : celles d’un avis public conforme sur la constitutionnalité. Les premières propositions de ce type avait été formulées au lendemain de l’annonce de ce que l’on a appelé le  “ référendum sur le référendum ”, c’est à dire la tentative de révision de l’article 11 en 1984 [20] . Elles ont été formulées pendant le débat sur le projet de loi constitutionnelle, puis par François MITTERRAND lui-même quand il prit à nouveau l’initiative d’une révision de la Constitution en 1992 [21] . Enfin, le Comité consultatif constitutionnel, mis en place pour examiner ce projet de révision préconisait également une telle solution [22] .

 

            Dans la mesure où le Conseil Constitutionnel  s’est déclaré incompétent pour contrôler la constitutionnalité de la loi référendaire [23] , la seule possibilité d’encadrement par le juge constitutionnel réside bien dans cet avis préalable sur la constitutionnalité du projet. Or aucune tentative de ce type n’a abouti.

 

            Restait une dernière voie, plus radicale, en vue d’encadrer ou plus exactement de contrer l’action des gouvernants: celle du référendum d’initiative populaire.

 

            Cependant, rares ont été les propositions en ce domaine. François MITTERRAND évoquera la question lors de la campagne présidentielle de 1988 dans sa “Lettre à tous les Français ”. Or il ne retiendra pas cette possibilité dans les deux projets de lois constitutionnelles du 10 mars 1993. De son côté, Valéry GISCARD D’ESTAING, dans son ouvrage “ Deux Français sur trois ” se prononcera pour  un tel référendum. [24] , mais il n’était plus au pouvoir. Enfin, il faut citer une proposition de loi constitutionnelle de Jacques TOUBON qui ne connaîtra aucun succès [25] .

 

            Une solution intermédiaire a été proposée par le comité VEDEL : il s’agissait du référendum d’initiative minoritaire, qui selon ses auteurs “combinerait celle des élus de la nation et celle des citoyens eux-mêmes ” [26] . Plus précisément c’est à “l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales ” qu’un projet de loi pourrait être adopter par le peuple français [27] .

           

            Cette proposition qui n’a pas eu de suite, avait pourtant l’avantage d’associer le Parlement et le peuple, ce qui aurait pu contribuer à donner au référendum, une allure moins antiparlementaire qu’indéniablement elle avait au début de la Ve. De plus, elle donnait aux minorités – parlementaires ou non - un droit non négligeable, ce qui aurait contribué à l’élaboration d’un statut de l’opposition. Bref il y avait là une vraie tentative de transformer le référendum en instrument de la démocratie représentative et libérale plutôt que d’en conserver ses traits classiques d’instrument d’une “démocratie consentante” [28] .

 

            L’intervention du peuple dans le champ législatif est donc réduite par l’action des gouvernants et ce malgré quelques tentatives de remise en cause qui ont toutes échoué. Cependant la limitation de l’intervention populaire résulte aussi du domaine réduit dans lequel le référendum peut être organisé.

 

 

b - Une intervention limitée par son domaine

           

 

            Dès l’origine de la Ve, les projets de loi qui pouvaient faire l’objet d’un référendum étaient peu nombreux. Ce qu’il est convenu d’appeler le domaine du référendum était donc étroit. Bien sûr, la révision constitutionnelle du  4 août 1995 a élargi ce domaine. Mais il ne semble pas que ce soit dans une large  mesure.

 

 

 1 - L’étroitesse initiale du domaine du référendum.

 

 

            Comme le rappelle Francis HAMON, il y a deux méthodes  de détermination du domaine du référendum législatif [29] . Ou bien il couvre le domaine de la loi parlementaire à l’exception de matières qui sont expressément citées. C’est une méthode extensive, elle est utilisée en Italie notamment. Ou bien, on donne la liste des matières dans lesquelles le référendum peut être organisé. C’est cette méthode  restrictive qui a été retenue par les constituants de 1958.

 

            Dans sa rédaction première, l’article 11 de la Constitution donnait une liste comprenant trois types de projet de loi pouvant faire l’objet d’un référendum. Il s’agissait  de “tout projet de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, comportant approbation d’un accord de Communauté ou tendant à autoriser la ratification d’un traité qui sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur le fonctionnement des institutions ”. Ce domaine a été réduit de fait par la disparition  rapide de la Communauté française.

 

            Les deux catégories restantes sont certes importantes, mais  il faut remarquer qu’elles ne concernent que les institutions. Qui plus est, chacune d’elles est énoncée ou a été interprétée de manière restrictive.

 

            Ainsi, les projets de loi tendant à autoriser la ratification d’un traité ne concernent-ils que certains traités, et la définition de cette catégorie de traité est des plus énigmatique. Mais en même temps, on sait qu’il s’agit des traités européens. Finalement, deux référendums seront organisés sur cette base, celui du 5 avril 1972 relatif à l’adhésion de la Grande-Bretagne à la CEE et celui du 20 septembre 1992 relatif à la ratification du traité de Maastricht.

 

Quant aux projets de loi portant sur l’organisation des pouvoirs publics, ils ne concernent finalement que peu de situations, si l’on part du principe que l’article 11 institue un référendum législatif. Le problème de la signification de ces termes s’est posé en 1984, à propos du projet de loi Savary. En simplifiant quelque peu, deux interprétations s’opposaient. L’une restrictive, désignant en quelque sorte l’appareil  de l’Etat au niveau le plus élevé. L’autre, plus large englobant les services publics. C’est la première qui a été retenue par le Président de la République. Ainsi on confinait le référendum à des questions relativement peu nombreuses [30] .Aussi, François MITTERRAND proposa-t-il une révision de l’article 11.

 

Le projet de loi constitutionnelle du 20 juillet 1984 prévoyait en effet d’élargir le domaine du référendum à des lois  “concernant les garanties fondamentales des libertés publiques” [31] . Certes il s’agissait d’ouvrir le domaine du référendum à d’autres questions. Toutefois, on restait sur le terrain des institutions ou plus exactement des rapports entre les citoyens et les institutions. L’ouverture du domaine était donc étroite. D’ailleurs le projet fut rejeté par le Sénat, et la porte à peine entrouverte se referma. Et ce malgré l’insistance de François MITTERRAND qui proposa à nouveau en 1993 ce même élargissement sans plus de succès [32] .

 

Il fallu attendre 1995 pour qu’une révision de l’article 11 aboutisse, faisant ainsi évoluer la situation.

 

2 - Le relatif élargissement de 1995.  

La loi constitutionnelle du 4 août  1995 prévoit que le référendum peut être organisé sur un projet de loi portant sur  “des réformes relatives à la politique économique ou sociale de la nation et aux services publics qui y concourent ”. De plus, elle supprime la catégorie des projets de loi  “comportant approbation d’un accord de communauté ” qui était devenue sans objet. Ce faisant, le domaine du référendum est sensiblement élargi, et ce de trois manières assez différentes.

 

            D’abord, par cette réforme le domaine du référendum  qui était jusqu’alors relatif à la vie de l’Etat  s’élargit à la vie de la nation. On passe de l’institutionnel à l’économique et au social. Ainsi, réalise-t-on du moins partiellement le vœu de ceux qui dès le septennat de Valéry GISCARD D’ESTAING voulaient étendre le référendum à des questions de société. Mais, l’élargissement réalisé n’est pas seulement quantitatif, il est qualitatif. En effet, l’économique et le social concerne le peuple, directement. Ce n’est donc pas simplement une matière supplémentaire que l’on ajoute, c’est un vrai domaine où le peuple décide lui-même de questions qui le concerne lui-même. C’est pourquoi “l’extension du champ du référendum vise à donner aux citoyens non seulement la parole mais encore le pouvoir sur un certain nombre de ces sujets. ” [33] . De plus, en toute logique, ce passage du secteur de l’Etat à celui de la nation devrait orienter le référendum du pôle du Président de la République vers celui du Premier ministre, mais politiquement parlant cela semble incertain. [34]

 

            Sur un plan plus technique, l’élargissement du domaine du référendum réalisé en 1995 semble également important, puisque la  méthode énumérative qui on le sait était utilisée jusqu’alors semble abandonnée. Certes la nouvelle rédaction de l’article 11 évoque comme par le passé trois catégories de projet de loi pouvant faire l’objet d’un référendum. Donc apparemment rien ne change. Mais la nouvelle catégorie citée est beaucoup plus que cela. Comme le remarque Francis HAMON  “ les limites de cette catégorie sont tellement imprécises qu’il paraît désormais impossible de dresser une liste exhaustive des matières comprises dans le champ du référendum ” [35] . Les matières qui ne relèvent pas de la politique économique et sociale sont en effet peu nombreuses. L’expression prête à une interprétation extensive. De plus le référendum peut également être organisé relativement aux services publics qui concourent à cette politique. Il y a là un second motif d’extension, car la notion de service public n’a jamais été définie avec précision.

 

 

            Enfin, on notera que le référendum porte sur des “réformes” Ce terme peut d’une certaine manière permettre la transformation du référendum normatif en référendum consultatif puisqu’il suffirait que le projet de loi soumis à l’approbation du peuple énonce simplement les grandes lignes de la réforme envisagée. On aurait alors affaire à un projet de loi cadre en quelque sorte. [36]

 

            Le domaine du référendum a donc été sensiblement élargi. Dans ces conditions, y a-t-il “banalisation” [37] du référendum ? Il ne semble pas que l’on puisse conclure ainsi, et ce pour plusieurs raisons.

 

            En premier lieu il convient de remarquer que par rapport au projet de loi constitutionnelle initial, le domaine référendaire est défini de manière plus étroite. Ce texte prévoyait en effet que le référendum pouvait porter sur les “orientations générales  de la politique économique et sociale” et non pas sur les “réformes relative à la politique… ” de plus et surtout c’est l’ensemble des services publics et pas seulement ceux qui concourent à telle politique qui étaient visés. Le Parlement  amendera dans ce sens restrictif le projet initial.

 

            Mais, l’élargissement du domaine du référendum doit surtout être relativisé par rapport à la pratique. Depuis la révision constitutionnelle, aucun référendum n’a été organisé. Pas plus celui qui semblait visé par la réforme ou qui l’avait justifié, c’est à dire le référendum sur l’éducation nationale, que celui relatif à l’abandon de la conscription. Aucun référendum n’a été organisé sur la nationalité pas plus que sur la ratification du Traité d’Amsterdam. Les sujets ne manquent pas. Bien sûr pour certains, la question de leur régularité se pose, même au regard de la nouvelle rédaction de l’article 11, pour d’autres c’est plutôt la crainte d’une réponse négative qui explique le non recours au référendum.

 

Il semble que rien n’ait fondamentalement changé. Certes l’intervention du peuple dans le champ législatif est potentiellement plus grande, mais comme le référendum  dépasse cette dimension par ses enjeux politiques, il demeure exceptionnel. Il en va de même  du référendum constitutionnel.

 

           

            B) L'intervention du peuple dans le champ constitutionnel

 

 

            C'est par un référendum que la Constitution de 1958 a été adoptée [38] . Par définition, ce référendum n’était pas prévu par la Constitution. Par contre, la Constitution dispose que sa révision peut être mise en œuvre par référendum.     

 

            C’était déjà le cas sous la IVe [39] , mais, aucune révision ne sera réalisée par cette voie. C’est également le cas sous la Ve, puisque l’article 89 de la Constitution prévoit que l’adoption définitive d’un projet ou d’une proposition de révision se fait en principe par cette voie [40] .Cependant, l’intervention du peuple dans le champ constitutionnel est conditionnée par l’action des gouvernants. De plus, il semble qu’elle soit tombée en désuétude puisque aucun précédent ne peut être cité.

 

a – Une intervention conditionnée par l’action des gouvernants

 

            L’exécutif comme le Parlement doivent intervenir préalablement à tout référendum de révision. Non seulement, ils ont l’initiative mais de plus ils décident du référendum.  

1 - L’initiative

 

            C’est l’ensemble des pouvoirs publics qui disposent de l’initiative [41] . D’abord bien sûr  l’exécutif à travers le Président de la République qui ne peut intervenir que sur proposition du Premier ministre. C’est cette voie qui a été utilisée dans les huit révisions entreprises sur la base de l’article 89. En période de cohabitation, l’initiative est donc partagée entre les deux têtes de l’exécutif. Leur accord est nécessaire, comme cela était le cas en 1992 pour la révision relative au droit d’asile [42] .

 

Toutefois, si cet accord est impossible, l’initiative pourra émaner du Parlement. Les parlementaires disposent en effet eux aussi de ce pouvoir. Ils l’exercent individuellement, mais pour aboutir encore faut-il que la proposition de loi constitutionnelle soit inscrite à l’ordre du jour des assemblées. C’est là une difficulté qui n’a jamais été surmontée.

 

Pourtant, le peuple ne peut se prononcer sur le texte du projet ou de la proposition de révision que dans la mesure où les gouvernants le décident.

 

2 – La décision

 

            La décision appartient au Parlement et au Président de la République. C’est d’abord le Parlement qui intervient puisque le texte doit être adopté dans les mêmes termes par les deux assemblées.  En rejetant le projet, voire la proposition, l’une ou l’autre des assemblées peut écarter le référendum de révision. C’est précisément ce qui s’est passé en 1984 [43] . Le Président de la République ayant pris l’initiative de réviser l’article 11 avait annoncé au français qu’il leur demanderait de ratifier ce texte dès lors qu’il aurait été adopté par le Parlement. Or, le Sénat a rejeté le texte, empêchant ainsi le peuple de se prononcer. Le même scénario devait se renouveler en 1990 [44] . Une fois de plus c’est le Sénat qui s’est opposé à la révision. Toutefois, dans ce cas, le Président de la République n’avait pas clairement annoncé ce qu’il ferait en cas d’adoption.

 

            En effet, le Président de la République a la possibilité d’empêcher lui aussi le référendum de révision. Il peut préférer à la voie populaire que représente le référendum la voie parlementaire qui se traduit par la convocation du Congrès. Mais ce choix, n’est possible que lorsque l’initiative émane du Président de la République lui-même et non des parlementaires, à condition bien sûr que les deux chambres aient adopté le texte du projet de loi constitutionnel. Même si le texte de la Constitution [45] fait de cette possibilité, l’exception, la pratique institutionnelle en a fait le principe. Aussi l’intervention du peuple dans le domaine constitutionnel  est-elle tombée en désuétude.

 

             

b –Une intervention tombée en désuétude

 

 

            Le constat d’une telle situation est évident, son dépassement l’est beaucoup moins.  

1 –La situation

          

            Les faits sont flagrants. Aucun référendum de l’article 89 n’a été organisé. Pourtant la Constitution a été révisée huit fois dans le cadre de cet article. Dans tous ces cas, il s’agissait de révision initiée par le Président de la République. Par conséquent, celui-ci pouvait écarter le référendum à l’issue de la procédure. Le côté systématique du choix du Congrès au détriment du référendum a fait oublier l’existence de ce référendum ; ou plutôt, il a eu pour effet de faire de ce choix l’exception.

 

            Les motifs d’une telle attitude n’ont jamais été explicitement exprimés. Pourtant, on peut mettre en avant le fait qu’un certain nombre de ces révisions ayant un caractère technique ne pouvaient pas faire l’objet d’un référendum. Il en va ainsi  de la révision de 1963 qui portait sur les dates d’ouverture des sessions du Parlement [46] , de celle de 1974 qui modifiait les règles de saisine du Conseil Constitutionnel [47] et de celle de 1976 qui complétait les règles de l’élection présidentielle en cas d’empêchement ou de décès d’un candidat [48] . Dans ces trois cas le changement de règles de procédure ne pouvait constituer l’enjeu d’une consultation populaire.

 

            La révision suivante, celle de 1992, a été nécessitée par la ratification du traité de Maastricht [49] . Elle ne s’est pas terminée par un référendum sans doute parce que le traité a fait l’objet d’un référendum de l’article 11 en vue d’autoriser sa ratification. Aussi, même si juridiquement les deux problèmes étaient différents, politiquement il s’agissait de se prononcer pour ou contre le traité.

 

            La première  révision de  1993 [50] peut être considérée comme une révision technique elle aussi, puisqu’elle ne reprenait que les dispositions  “judiciaires” du projet de révision de François MITTERRAND.

             

            La révision de 1995 [51] intervenant juste après l’élection présidentielle, on comprend qu’elle n’ait pas donné lieu à une nouvelle consultation populaire, même si elle concernait directement le peuple.

 

            Enfin, deux révisions se sont terminées sans référendum parce que manifestement les dirigeants politiques ne voulaient pas donner l’occasion à certains courants populistes de s’exprimer. Il s’agit d’abord de la deuxième révision de 1993 [52] portant sur le droit d’asile et de celle de 1996 [53] relative à la sécurité sociale.

 

            De son côté le Sénat, on le sait, s’est au moins une fois opposé au référendum de révision et une autre fois opposé à un projet de révision dont on ne savait pas certes s’il déboucherait sur un référendum. C’est en vue de dépasser cette situation que le comité VEDEL avait en son temps proposé une réforme qui ne sera pas mise en œuvre.

 

2 –Le dépassement de cette situation : la réforme Vedel

 

 

            La nouvelle rédaction de l’article 89 prévoyait qu’en cas de rejet d’un projet ou d’une proposition de révision par l’une ou l’autre des assemblées, le Président de la République pourrait soumettre le texte à référendum. Certes le texte devait pour ce faire avoir été adopté par l’autre chambre à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

 

            Cette réforme aurait permis au Président de la République sinon de surmonter l’opposition d’une chambre du moins de faire de la Nation l’arbitre de la situation. Ainsi le référendum constituant n’aurait-il plus dépendu d’un accord de tous les pouvoirs publics.

 

            Dans ces conditions, le référendum de révision constitutionnelle se serait rapproché de celui de l’article 11. Certes, le Président de la République n’aurait pu organiser un référendum qu’avec l’accord d’une assemblée au moins mais, en dehors des périodes de cohabitation le soutien des députés, sans être automatique  est quasiment acquis.

 

            La réforme proposée aurait ainsi pu déboucher sur l’interdiction de l’utilisation  de l’article 11 en vue de réviser la Constitution. Le doyen VEDEL liait en effet les deux points.

                            

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            Jamais dans notre histoire constitutionnelle le peuple n’a eu autant de possibilités d’intervenir dans le champ constitutionnel et dans le champ législatif. Mais rares ont été les occasions de réaliser ces possibilités. Plusieurs réformes ont été faites ou tentées sans que la situation évolue vraiment. S’il en est ainsi c’est sans doute parce que le référendum a été victime d’une utilisation particulière. Compris comme une arme politique au service du Président de la République le référendum n’a pu pleinement jouer son rôle de tempérament au régime représentatif.

 

 

 

II - LE REFERENDUM, INSTRUMENT DE LA PRESIDENTIALISATION DU RÉGIME

 

 

 

            Très  vite le Général de Gaulle a utilisé le référendum, et ce à plusieurs reprises. Un référendum en 1961, deux en 1962 ! Une telle utilisation groupée dès le début de la Ve par le fondateur de celle-ci devait laisser des traces profondes et modifier sensiblement  le  référendum et d’une certaine manière le régime lui-même.

 

            Plus précisément, le référendum a permis la personnalisation du régime et dans une large mesure sa présidentialisation. En effet, en s’appuyant sur le peuple le général de Gaulle a pu imposer sa politique algérienne. Ce faisant, le Président de la République renforçait sa position au sein des institutions. Ce phénomène se développera au prix  d’une transformation  du référendum en plébiscite mais  connaîtra quelques limites.

 

 

A) Les manifestations du phénomène : la dérive plébiscitaire

                                                               

 

            Il n’y a qu’en France que le terme plébiscite ait une connotation péjorative. Dans d’autres pays et en particulier en Suisse plébiscite et référendum sont synonymes. S’il en est ainsi c’est en raison de l’usage singulier qui sera fait du référendum par BONAPARTE. Il consolidera progressivement son pouvoir en détournant l’instrument qui en principe ne sert qu’à faire adopter un texte par le peuple. Aussi,  peut-on dire comme le fait Jacques CADART que le plébiscite “c’est un référendum d’initiative non populaire détourné de son but, organisé par un homme pour conserver ou amplifier le pouvoir qu’il détient ” [54] . Cette définition s’applique tout à fait aux référendums qui ont été initiés par le général de Gaulle. Dans tous les cas en effet, le référendum a permis au chef de l’Etat d’élargir ses prérogatives ou alors de faire soutenir sa politique, en bref de renforcer sa position au sein des institutions.

a – L’élargissement des prérogatives du président

   

            Cet élargissement est manifeste. Il s’est traduit notamment par l’usage particulier de l’article 11 aux fins de révision de la Constitution. Il passe aussi par la création d’un tout nouvel instrument au service du Président de la République : les ordonnances référendaires.

 

1 – La transformation du référendum législatif en référendum constituant

 

Il s’agit là d’une situation relativement connue. On sait que par deux fois le général de Gaulle a utilisé le référendum de l’article 11 pour réviser la Constitution. La première fois, le 20 octobre 1962 [55] l’opération  réussira et se traduira par l’instauration d’un nouveau mode d’élection du Président de la République : le suffrage universel direct. La deuxième fois, le référendum sera un échec [56] . Le peuple refusera  la réforme régionale et la transformation du Sénat.

 

Au delà du débat classique sur la régularité du procédé utilisé pour réviser la Constitution, ces deux précédents montrent que le but recherché par le Président de la République en utilisant le référendum comme il l’a fait, était bien de renforcer ses prérogatives et notamment face aux autres pouvoirs. Ces précédents montent aussi que l’utilisation elle-même du référendum traduisait un élargissement des prérogatives présidentielles.

 

D’abord, les deux référendums visaient à renforcer les pouvoirs du Président [57] . C’est évident pour le premier puisqu’il s’agissait de donner au Président de la République une légitimité populaire, faisant ainsi de celui-ci un représentant de la Nation au même titre que les députés. De cette façon une nouvelle lecture de la Constitution s’imposait. C’est très précisément le but que recherchait de GAULLE en  1962 au moment où objet de plusieurs attentats il pensait à ses successeurs et voulait ainsi renforcer leur position et pérenniser son œuvre : Ve République. C’est d’ailleurs ce qui adviendra.

 

Quant au deuxième référendum, celui de 1969, son objectif principal était bien de mettre en place la réforme régionale, mais il devait aussi supprimer le Sénat pour le remplacer par une chambre  largement inspirée de celle décrite en 1946 dans le fameux discours de Bayeux, c’est à dire une chambre représentant également les intérêts économiques et sociaux. Ce faisant de GAULLE espérait bien se débarrasser du seul organe qui faisait contrepoids à son pouvoir.

           

Par leur objet les deux référendums tendaient donc bien à renforcer le pouvoir du Président, mais, en eux-mêmes, par la façon dont ils étaient mis en œuvre ils traduisaient une extension non négligeable des prérogatives présidentielles. Dans les deux cas en effet, l’article 11 a été détourné de sa finalité. Plus précisément, en utilisant la procédure de l’article 11 pour réviser la Constitution, de GAULLE passait par-dessus le refus  du Parlement qui dans le cadre de l’article 89 l’aurait empêché de soumettre son projet à l’approbation du peuple. Ainsi le Président de la République palliait l’un des défauts importants de l’article 89 : l’impossibilité de faire trancher par le peuple un différent entre l’exécutif et le Parlement. On sait comment quelques années plus tard, sans succès, le Comité VEDEL tenta de proposer une autre solution. Par cette pratique, le Président se réservait la possibilité de modifier la Constitution, qui plus est sur des points concernant ses propres pouvoirs.

 

Le général de GAULLE ira plus loin encore dans l’extension de ses prérogatives par le biais du référendum.

 

2 – L’instauration des ordonnances référendaires

   

            Par les deux premiers référendums de la Ve, celui du 8 janvier 1961 et celui du 8 avril 1962, le Président de la République était habilité à prendre par ordonnance ou par décret un certain nombre de mesures relevant normalement de la loi.

 

            La première habilitation ne citait que des “décrets pris en Conseil des ministres” sans évoquer explicitement le Président de la République. De plus ces décrets devaient réglementer l’organisation des pouvoirs publics en Algérie  “suivant les dispositions de l’article 72 ”. [58] Comme le dit Gérard CONAC tout cela  “n’était pas d’une parfaite clarté …mais il y avait…bien délégalisation temporaire d’une matière réservée à la loi ”. [59]

 

            La deuxième habilitation était plus précise, puisque cette fois-ci, c’était le Président de la République qui était désigné comme titulaire de la délégation législative,  de plus il était question ici d’ordonnances par lesquelles pouvaient être prises “toutes mesures législatives ou réglementaires relatives à l’application des déclarations gouvernementales du 19 mars 1962 ” [60]

 

            Là encore s’est posé le problème de la constitutionnalité d’un tel procédé, elle était plus facile à admettre que dans le cas de la révision de la Constitution par l’article 11. Mais la question sera éludée du fait de l’attitude du Conseil d’Etat qui dans son arrêt CANAL [61] exercera son contrôle sur ces ordonnances en les assimilant à celles de l’article 38. De ce fait, les prérogatives présidentielles, même singulièrement élargies par l’usage du référendum, font l’objet d’un contrôle juridictionnel, et sont par conséquent quelque peu limitées.

 

            Il n’en demeure pas moins que de manière générale, le référendum tel qu’il a été utilisé par le général de Gaulle, a servi à élargir les prérogatives présidentielles, en cela, il s’est bien transformé en plébiscite. Mais si c’est le cas, c’est aussi et surtout parce que le référendum a été utilisé comme un instrument de soutien du Président de la République.

 

b – Le soutien du président

 

            Le général de Gaulle a pratiqué ce que bon nombre d’observateurs ont appelé le référendum-question de confiance. En d’autres termes il demandait explicitement aux français de soutenir sa politique et au travers de celle-ci c’est son mandat qu’il remettait en jeu. Pour certains de ses  successeurs le soutien sera sollicité implicitement.

 

1 – Le soutien explicite

 

   Dans les quatre référendums qu’il a organisés, le général de Gaulle a toujours menacé de démissionner en cas de rejet du texte proposé. Dès 1961 quelques jours avant le référendum du 8 janvier, le chef de l’Etat évoquait le rejet de son texte sur l’autodétermination en ces termes : “ Quel coup serait porté, m’empêchant de poursuivre ma tâche ” [62] . A la veille du deuxième référendum c’était une version plus positive du même message qui était délivrée :  “ Les Français prouveront que j’ai leur confiance avec moi, pour aujourd’hui et pour demain ” [63] .Quelques mois plus tard, avant le référendum du 28 octobre 1962 le langage utilisé était beaucoup plus précis et direct :  “ Si votre réponse est non comme le voudraient  tous les anciens partis afin de rétablir leur régime de malheur, ainsi que tous les factieux pour se lancer dans la subversion … il est bien évident que ma tâche sera terminée aussitôt et sans retour ” [64] . Enfin, à la veille du dernier référendum la menace était prononcée dans des termes quasiment identiques : “ Si je suis désavoué par une majorité d’entre vous, solennellement, sur ce sujet capital …ma tâche actuelle de chef de l’Etat deviendra évidemment impossible et je cesserait aussitôt d’exercer mes fonctions. ” [65] .

 

Le procédé est donc particulier.  Comme le remarque Gérard CONAC, “le général de  GAULLE en même temps qu’il soumet au peuple une réforme, se soumet lui-même à son verdict ” [66] On peut y voir une question de confiance semblable à celle que pose un chef de gouvernement pour faire passer un texte considéré comme fondamental. Simplement, comme c’est le Président de la République qui intervient ce n’est pas devant le Parlement, mais devant le peuple directement que la responsabilité est engagée [67] .

 

Mais on peut aussi y voir “une réélection sans adversaire du Président ” comme le dit Jacques CADART [68] . Il est vrai que le référendum gaullien a servi de substitut à l’élection présidentielle à un moment où celle-ci n’impliquait pas le peuple directement. Le fait que dans ce type d’“élection ” il n’y ait pas d’adversaires étant compensé par le  “risque assumé ” [69] , c’est à dire la démission du Président mis en échec. Cette  démission débouchant sur une véritable élection présidentielle : c’est le scénario de 1969.

 

Ce précédent va avoir des conséquences : il fera apparaître les deux tranchants de l’arme qu’est le référendum utilisé de cette manière. Aussi les successeurs du général  ne renonceront-ils pas à cet usage du référendum, mais de manière beaucoup moins explicite.  

2 – Le soutien implicite                     

           

            Trois référendums seront organisés après le départ du général de GAULLE ;  l’un, en 1972  par Georges POMPIDOU et deux autres bien longtemps après par François MITTERRAND, en 1988 et 1992. Aucun de ces deux présidents ne posera explicitement la “question de confiance”, aucun ne menacera de quitter le pouvoir. Et pourtant, dans une certaine mesure chacun savait qu’au-delà du texte une autre question était tacitement posée. “ Toute l’ambiguïté du référendum est là : le monopole donné, en fait, au chef de l’Etat conduit fatalement à ce que les électeurs répondent non seulement à la question, mais dans une proportion variable, à son auteur. ” [70]

 

            Ainsi, la pratique purement plébiscitaire du référendum s’atténue-t-elle en une “pratique hyper-personnalisée ” [71] . En d’autres termes, le référendum comme la dissolution devient un moyen entre les mains du Président de la République de solliciter même indirectement le soutien populaire et ce souvent sur un arrière fond de stratégie électorale.

 

            C’est dans de telles conditions, que Georges POMPIDOU décidera d’organiser un référendum. Son objet était bien de faire approuver la politique européenne du Président. Mais accessoirement il s’agissait de remodeler la majorité en attirant les centristes d’opposition, et de diviser l’opposition de gauche qui venait certes de signer un programme commun de gouvernement, mais qui sur la question européenne n’avait pas su trouver un accord. Ce référendum avait donc un caractère “majoritaire” [72] .Tout comme les deux référendums de François MITTERRAND avaient un caractère “présidentialisé” [73] .

 

            Certes, le référendum de 1988 sur la Nouvelle-Calédonie est sans doute celui qui est le plus conforme aux textes. Il n’empêche qu’il n’est pas dénué de toute arrière-pensée politique. Il intervient alors que la popularité personnelle du Président est encore forte au lendemain de l’élection présidentielle pour faire oublier l’échec relatif des législatives provoquées par la dissolution du 14 mai 98. Plus accessoirement il est permis de penser que l’électorat centriste convoité dans le cadre d’une “politique d’ouverture” rejoindra ainsi le Président de la République. On le voit la parenté avec le référendum précédent est évidente. Bien sur François MITTERRAND pas plus que Georges POMPIDOU ne s’engageront expressément. Mais il est clair que le but recherché était bien le renforcement de la position présidentielle, comme d’ailleurs lors du dernier référendum, celui de 1992 relatif à la ratification du Traité de Maastricht.

 

            Dans ce cas, le Président de la République comptait bien diviser la droite sur la question européenne et renforcer son autorité personnelle à l’approche des élections législatives, enfin, en cas d’échec lors de celles-ci, aborder en position de force la nouvelle cohabitation.

 

            Même si, le caractère plébiscitaire du référendum s’est atténué, il n’en demeure pas moins qu’il reste un instrument de la personnalisation du régime et plus précisément de sa présidentialisation. Mais, le phénomène  connaît des limites.

           

                       

            B) Les limites du phénomène : vers d’autres pratiques référendaires ?

 

 

                        Les dernières années ont fait apparaître des limites au caractère plébiscitaire du référendum, mais d’autres limites pourraient se dessiner à l’avenir.

 

a -  Les limites du passé : les pratiques récentes

 

            Dans un premier temps, le référendum tombera en désuétude, lorsque plus tard il sera à nouveau mis en œuvre, ce sera une pratique référendaire plus conforme aux textes qui verra le jour.  

1 – Le quasi-abandon du référendum

           

Entre le référendum de Georges POMPIDOU sur l’Europe et le suivant, celui de François MITTERRAND sur la Nouvelle-Calédonie seize années s’écouleront. C’est à dire plus qu’entre le début de la Ve et précisément le référendum de Georges POMPIDOU ! Dans une telle période, deux Présidents accomplissant totalement leur septennat se succéderont.

 

Une telle “relégation” [74] traduit bien sûr le trouble engendré par la pratique plébiscitaire du référendum. Mais elle s’explique aussi par la prise de conscience après l’échec du général de GAULLE et le demi-échec ou demi-succès de Georges POMPIDOU [75] , de la difficulté d’utiliser ainsi le référendum.

 

Le fait que Valéry GISCARD D’ESTAING n’ait pas utilisé le référendum tient bien sûr à de telles considérations. Elu avec 50,81 % des suffrages exprimés, il lui était difficile de prendre le risque d’un échec, d’autant plus que la bipolarisation avait atteint son stade ultime. D’autres raisons  s’ajoutaient sans doute, plus profondes, tenant à une conception des institutions différente de celle des gaullistes. Pour Valéry GISCARD D’ESTAING en effet, il ne s’agissait pas d’imposer se vues aux partis politiques en s’appuyant sur le peuple par le biais d’un référendum voire d’une dissolution. Au contraire, le strict respect du calendrier électoral était pour lui une règle de base : “la durée même de son mandat garantissait la continuité et la cohérence de sa politique”. [76]  En réalité, on était définitivement passé dans un nouveau système où l’autorité du Président de la République reposait et sur son élection par le peuple et sur le soutien d’une majorité parlementaire. Le caractère semi-direct du régime s'estompait au profit d'une conception plus représentative dans laquelle notamment il n’était pas possible au peuple de remettre en cause même indirectement le mandat présidentiel.

 

Le premier septennat de François MITTERRAND se terminera sans recours au référendum. Ce n’est pas faute d’avoir essayé, mais il lui était difficile de recourir l’article 11 tant il avait fustigé l’utilisation gaullienne. Les événements firent qu’il préféra l’article 89, qui mène beaucoup plus difficilement au référendum, si difficilement d’ailleurs qu’il dû renoncer face à l’opposition du Sénat. Aussi, lorsqu’il fut réélu en 1988 il recouru à l’article 11, dans des conditions qui furent reconnues par beaucoup comme étant plus conformes à la lettre de la Constitution.

 

2 - Le retour à une pratique référendaire plus conforme

 

            Le premier référendum de François MITTERRAND a été qualifié de “gouvernemental” par plusieurs auteurs dont Jean GICQUEL [77] , pour souligner le fait que l’initiative du référendum était bien, pour la première fois, d’origine  gouvernementale et non présidentielle. Ainsi, avec ce référendum on a un exemple de ce qu’il aurait toujours du être.

 

            Bien sûr en 1988, après la réélection de François MITTERRAND mais aussi après son demi-échec aux élections législatives, le Gouvernement était aux avant-postes. On entrait dans ce que d’aucuns appelleront la présidence relative. [78] Dans ce nouveau contexte, il n’était pas étonnant de voir le Premier ministre prendre des initiatives, notamment celle d’un référendum puisqu’il avait “hérité” du dossier calédonien. Si politiquement le règlement de ce dossier impliquait un geste important s’appuyant sur la volonté de la Nation, il nécessitait aussi, techniquement, le recours à une loi échappant au contrôle du Conseil Constitutionnel en raison de la délimitation du corps électoral opérée dans le texte  qui n’était pas des plus constitutionnelles.

 

            Cependant, comme on a pu le constater précédemment, tout cela convenait au Président de la République qui pouvait tirer parti d’un succès attendu du oui. Ainsi, même dans le meilleur des cas, on voit que le caractère plébiscitaire reste toujours sous-jacent. Il est vrai que le  Président de la République s’est contenté d’un engagement minimal et qu’il a dédramatisé la campagne électorale : “ la victoire du oui sera la victoire de personne sur personne, mais celle de la France toute entière” [79] . Mais l’espoir d’autres référendums de ce type a été déçu. Aussi faut-il chercher dans l’avenir d’autres limites aux déviations plébiscitaires du référendum.     

 

b – Les limites à venir : vers de nouvelles pratiques ?

         

            Deux sortes de limites pourraient se dessiner à l’avenir. Les unes, à l’intérieur même de la pratique plébiscitaire qui consisteraient en une sorte de plébiscite inversé, les autres en dehors de cette pratique et qui s’analyseraient comme un référendum enfin réhabilité.  

1 – “Le plébiscite inversé”

 

            Le référendum est une arme efficace dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui la démocratie d’opinion, c’est à dire le système dans lequel les gouvernants vont au devant de l’opinion populaire et la suivent. La dérive plébiscitaire n’est au fond pour le chef de l’Etat qu’un moyen d’exploiter à son profit ce système. En s’appuyant sur le peuple, il peut surmonter l’obstacle que peuvent constituer ses opposants. Or les opposants peuvent être tentés eux aussi de tirer parti d’une telle situation en demandant un référendum sur une question qui risque d’embarrasser le Président. Il y a là, une exploitation démagogique de certains thèmes pour faire pression sur le Chef de l’Etat. Bien sûr ils n’ont pas le pouvoir de décider du référendum, mais le fait de réclamer avec insistance un tel référendum peut constituer un moyen dilatoire.

 

            Ainsi, les demandes réitérées de référendum sur la ratification du Traité d’Amsterdam où encore les demandes de référendum sur la loi relative à la nationalité peuvent donner une idée de  ce que pourrait être ce plébiscite inversé si  ces demandes avaient été formulées de manière plus insistante ou si elles avaient été relayées par des campagnes politiques plus importantes. Si une dérive populiste de notre vie politique se confirmait et se développait un tel  plébiscite inversé  prendrait alors tout son sens.

           

Mais, un deuxième type de “ plébiscite inversé ”  pourrait voir le jour plus tôt encore. Il s’agit de l’hypothèse où pendant la cohabitation le chef de l’Etat et le Premier ministre décideraient d’un commun accord de faire arbitrer un conflit qui les opposerait, par le peuple on organisant un référendum. Il est clair que si un tel cas se présentait celui qui verrait sa thèse rejetée par le peuple devrait en tirer les conséquences et démissionner [80] . Un tel référendum aurait donc un caractère plébiscitaire évident, mais dans ce cadre inédit, le Premier ministre lui-même pourrait bénéficier de ce caractère. C’est en cela que l’on pourrait parler de “ plébiscite inversé ”. Toutefois on peut estimer que ce sont d’autres pratiques qui verront le jour celles qui auront pour résultat de réhabiliter enfin le référendum.

 

2 – Le référendum réhabilité       

 

            Francis HAMON a envisagé deux types de référendum qui pourraient se développer à l’avenir. [81]

 

            Le premier est fondé sur une stratégie de concertation et l’auteur le désigne par les termes de “référendum d’apaisement”. Cette hypothèse correspond à un projet qui a fait l’objet d’une longue discussion entre des partenaires multiples et aux positions différentes, voire à une négociation entre adversaires et qui au terme de celles-ci, pour sceller l’accord ainsi dégagé est soumis à l’approbation du peuple. Ici, il ne s’agit pas pour le peuple de trancher, de donner raison à un camp contre un autre, mais bien de réconcilier et donc d’apaiser. On peut reconnaître dans ce type de référendum celui  de 1988 sur la Nouvelle-Calédonie qui s’en rapproche le plus. Mais à travers cet exemple on en devine les inconvénients. De tels référendums ne sont pas mobilisateurs puisque tout enjeu a disparu. Aussi le risque encouru est-il celui de l’abstention, d’une très forte abstention.

 

 

            Le second type de référendum envisagé par l’auteur est fondé sur une stratégie d’ouverture, il s’agit du “référendum de désengagement ”. Dans cette hypothèse, les gouvernants abdiquent toute volonté. Ils renoncent à faire un choix. Ils s’en remettent à la décision du peuple. C’est ce type de référendum qui est pratiqué en Suède par exemple où de cette manière a été décidé le démantèlement des centrales nucléaires. Pour permettre au peuple de choisir, il faudrait évidemment lui soumettre plusieurs options comme c’était le cas en 1945. Or sous la Ve, dans le cadre de l’article 11 une telle solution paraît impossible à mettre en œuvre, puisque l’on doit soumettre un projet de loi à l’approbation du peuple. De plus, une telle solution serait en  contradiction totale avec le caractère représentatif de notre système. Le référendum ne serait plus alors un simple tempérament au régime représentatif.

 

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            En réalité, le référendum a été victime de la logique majoritaire qui s’est mise en place avec la transformation du système de partis. Dans ce cadre le référendum peut au mieux servir à faire approuver des grands choix qui transcendent les clivages partisans comme les questions européennes, mais en prenant le risque d’un échec (51% pour Maastricht en 1992) ou celui de la démotivation (63% d’abstention lors du référendum sur la Nouvelle-Calédonie)

 

            Le référendum pourrait présenter un certain intérêt dans le cadre d’une logique de rassemblement [82] , c'est à dire dans l’hypothèse où la bipolarisation se diluant progressivement le Président de la République pourrait être alors amené à s’appuyer sur des forces diverses qu’il réunirait derrière lui par le biais du référendum. Mais alors, poindrait le danger soit d’un principat plébiscitaire, comme ce fut le cas avec le général de GAULLE, soit d’un populisme racoleur.

 

               La voie est donc étroite. Faute  d’être pleinement un instrument de démocratie semi-directe [83] le référendum dérive en plébiscite. En raison de cette dérive il cesse d’être ce tempérament au caractère représentatif du régime : on est au cœur de l’ambivalence de l’institution référendaire.

 

           

Raymond FERRETTI

Maître de Conférences à l’Université de Metz

 



[1] Voir Francis HAMON “ L’extension du référendum ” POUVOIR n° 77, 1996 p. 115.

[2]   Sept référendums ont été organisés sous la V: le 8janvier 1961 sur l’autodétermination en Algérie, le 8 avril 1962 sur les accords d’Evian, le 20 octobre 1962 sur l’élection du Président de la République au suffrage universel direct, le 27 avril 1969 sur la réforme régionale et le Sénat, le 23 avril 1972 sur l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun, le 6 novembre 1988 sur la Nouvelle-Calédonie et le 20 septembre 1992 sur le traité de Maastricht, soit quatre pour de GAULLE, un pour POMPIDOU et deux pour MITTERRAND.

[3] Articles 59 et 60 de la Constitution du 24 juin 1794.Voir Marcel MORABITO et Daniel BOURMAUD “ Histoire constitutionnelle et politique de la France ” 3e édition MONTCHRESTIEN 1993  p. 109

[4] Article 115 de la Constitution du 24 juin 1793.

[5] Voir Gérard CONAC “ Les débats sur le référendum sous la Ve République. POUVOIRS n° 77  1996 p. 95.

[6]   Voir Marcel PRELOT et Jean BOULOUIS “ Institutions politiques et droit constitutionnel ” DALLOZ 10e édition 1987 p. 371 voir également MORABITO et BOURMAUD op. cit. p.155

[7] René CAPITANT “ Ecrits constitutionnels ” Edition du CNRS 1982 Voir notamment p.429.

[8] Raymond CARR de MALBERG “Considérations théoriques sur la question de la combinaison du référendum avec le parlementarisme” RDP 1931 p. 225.

[9] Gérard CONAC “ L’article 11 ” in François LUCHAIRE et Gérard CONAC “ La constitution de la République française ”, ECONOMICA  2ème édition 1987 p.411.

[10] Sur le référendum en général on consultera Jean-Marie DENQUIN “Référendum et plébiscite Essai de théorie générale”. LGDJ 1976 ainsi que le n° 77 de la revue POUVOIRS tout entier consacré au référendum ,de même que Michelle GUILLAUME-HOFFNUNG “Le référendum” QSJ n° 2329 PUF 1987 et Francis HAMON “ Le référendum. Etude comparative ” Collection Système LGDJ 1995.

[11] Gérard CONAC “l’article 11” loc. cit. p. 446.

[12] Jean GICQUEL “Droit Constitutionnel et institutions politiques”, Montchrestien 15 e édition 1997 p.584

[13] Jean GICQUEL op. cit. p. 585. Sur ce référendum, voir également du même auteur “ Le référendum du 6 novembre 1988 ” in “ Le référendum, quel avenir ? ” 1990 p.89 ainsi que M-L. PAVIA “le référendum du 6 novembre 1988 ”, RDP 1989 p.1697

[14] Guy CARCASSONNE “ La Constitution ” 1996 Edition du Seuil, Collection Points (Essais) 1996. p.86.

[15] Gérard CONAC “l’article 11” op. cit. p .448

[16] Sur la révision voir notamment François LUCHAIRE “ La loi constitutionnelle du 4 août 1995 ” RDP, 1995

[17] “ On a rendu explicite et obligatoire ce qui était auparavant implicite et facultatif ” Francis HAMON “ L’extension du référendum ”, POUVOIRS, n° 77, 1996, p. 114.

[18] Christian BIGAULT  “ La révision constitutionnelle du 4 août 1995 ” Regards sur l’actualité, n°214, p.14.

[19] Voir Joël MEKHANTAR  “ Droit politique et constitutionnel ” Edition ESKA 1996. p. 360

[20] Projet de loi constitutionnelle du 20 juillet 1984.

[21] “ …le Conseil constitutionnel donnerait publiquement son avis, avant la consultation, sur la conformité du projet de loi à la Constitution, aux lois organiques, à nos engagements internationaux et aux grands principes qui fondent nos libertés, reconnues par les lois de la République ” Extraits  de la lettre adressée par F. MITTERRAND  aux Présidents des assemblées parlementaires publiée dans “ Le Monde ” du 2 décembre 1992.

[22] “ Le projet ne peut être soumis au référendum qu’après constatation par le Conseil constitutionnel de sa conformité à la Constitution. ” Extraits du “ Rapport remis au Président de la République le 15 février 1993 par le Comité consultatif pour la révision de la Constitution ”. JORF du 16 février 1993 Annexe article 11.

[23] Décision 62-20 DC du 20 novembre 1962 et décision 92-313 DC du 23 septembre 1992.

[24] Valéry GISCARD D’ESTAING “ Deux Français sur trois ” Flammarion 1984

[25] Voir Philippe AUGE “ La nouvelle rédaction de l’article 11 de la Constitution de la Ve République : Vers une réactivation de la procédure référendaire ? ” Cette revue n° 6 du 12 janvier 1996.

[26] Voir “Rapport remis au Président de la République le 15 février 1993 par le “Comité consultatif pour la révision de la Constitution ” op. cit. § 38.

[27] Idem

[28] L’expression est de Georges BURDEAU in “La démocratie” Encyclopédie Universalis.

[29] Francis HAMON loc. cit. p.115

[30] Cinq référendums ont été organisé sur de tels projets de loi.

[31] Ce type de projet de loi devait se substituer à ceux tendant à approuver un accord de communauté.

[32] Projet de loi constitutionnelle du 10 mars 1993.

[33] Propos du Garde des Sceaux , Monsieur Jacques TOUBON rapporté par Francis HAMON loc. cit. p. 116

[34] Gérard CONAC “Les débats sur le référendum ” loc. cit. p. 106.  “ De la mouvance présidentielle il va pouvoir glisser dans la mouvance gouvernementale ”

[35] Francis HAMON loc cit p. 116.

[36] Idem

[37] Jacques LARCHE JO Sénat 26 juillet 1995 p 1391

[38] Référendum du 28 septembre 1958.

[39] article 90 de la Constitution du 23 octobre 1946 : “ La révision a lieu dans les formes suivantes.

 La révision doit être décidée par une résolution adoptée à la majorité absolue des membres composant l’Assemblée Nationale.

La résolution précise l’objet de la révision.

Elle est soumise, dans le délai minimum de trois mois, à une deuxième lecture à laquelle il doit être procédé dans les  mêmes conditions qu’à la première, à moins que le Conseil de la République, saisi par l’Assemblée Nationale, n’ait adopté à la majorité absolue la même résolution.

                Après cette seconde lecture, l’Assemblée Nationale élabore un projet de loi portant révision de la Constitution. Ce projet est soumis au Parlement et voté à la majorité et dans les formes prévues pour la loi ordinaire.

                Il est soumis au référendum, sauf s’il a été adopté en seconde lecture par l’Assemblée Nationale à la majorité des deux tiers ou s’il a été voté à la majorité des trois cinquièmes par chacune des deux assemblées. ”

[40] Article 89 : “ Le projet ou la de révision doit être voté par les deux assemblées en termes identiques. La révision est définitive après avoir été approuvé par référendum. ”

[41] Article 89 “ L’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République sur proposition du Premier ministre et au membres du Parlement ”

[42] Loi constitutionnelle du 25 juin 1992.

[43] Projet de loi constitutionnelle du 20 juillet 1984.

[44] Projet de loi constitutionnelle du 29 mars 1990. Ce texte prévoyait d’instituer la saisine individuelle du Conseil Constitutionnel.

[45] Article 89 : “ Toutefois, le projet de révision n’est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement convoqué en Congrès ”

[46] La loi constitutionnelle du 30 décembre 1963 modifiait l’article 28 de la Constitution.

[47] La loi constitutionnelle du 29 octobre 1974 modifiait l’article 61alinéa 2 de la Constitution.

[48] La loi constitutionnelle du 18 juin 1976 modifiait l’article 7 de la Constitution.

[49] La loi constitutionnelle du 23 juin 1992 modifiait les articles 2,54,et 74 de la Constitution et y ajoutait un  nouveau titre :  “ Des Communautés européennes et de l’Union européenne ” comprenant quatre articles : 88-1, 88-2, 88-3, 88-4.

[50] La loi constitutionnelle du 27 juillet 1993 modifiait les dispositions relatives au Conseil supérieur de la Magistrature ainsi que celles concernant la responsabilité pénale des ministres en créant notamment une Cour de Justice de la République.

[51] La loi constitutionnelle du 4 août 1995 a élargi le champ du référendum législatif en modifiant l’article 11 ; elle a institué la session unique en modifiant l’article 26 et a abrogé les articles 77 à 87 du titre XIII relatifs à la communauté ainsi que les articles 90 à 93.

[52] La loi constitutionnelle du 25 novembre 1993 a introduit un nouvel article 53-1 relatif aux accord internationaux en matière de droit d’asile.

[53] La loi constitutionnelle du 22 février 1996 a modifié l’article 34 pour permettre au Parlement d’adopter chaque année une loi de financement de la Sécurité sociale. Elle a également ajouté un article 47-1 prévoyant la procédure d’adoption de ces lois.

[54] Jacques CADART “ Institutions politiques et droit constitutionnel ” LGDJ  Tome 1 2° édition 1979 p 204

[55] Ce référendum a permis l’adoption de la loi constitutionnelle du 6 novembre 1962 qui modifiait les articles 6 et 7 de la Constitution

[56] Il s’agit du référendum du 27 avril 1969. Le texte proposé sera rejeté par 52,41% des suffrages exprimés.

[57] “ En 1962, le référendum sur le mode d’élection du Président de la République a été utilisé par le général de Gaulle pour faire confirmer son autorité ainsi que pour prévenir la menace d’affaiblissement de la fonction présidentielle. Le Président de la République a joué la rapidité : il est constamment resté maître du processus qu’il avait déclenché par son initiative inattendue voire insolite ” Gérard CONAC “ L’article 11 ” loc. cit. p. 474

[58] Loi référendaire du 14 janvier 1961, article 2 :  “ Jusqu’à l’accomplissement de l’autodétermination tel que prévu à l’article 1er,de décrets pris en Conseil des ministres régleront l’organisation des pouvoirs publics en Algérie suivant les dispositions de l’article 72 ”

[59] Gérard CONAC “l’article 11” loc. cit. p.431

[60] Loi référendaire du 13 avril 1962, article 2 : “ Jusqu'à la mise en place de l’organisation politique nouvelle éventuellement issue de l’autodétermination des populations algériennes, le Président de la République peut arrêter, par voie d’ordonnances ou selon le cas de décrets pris en Conseil des ministres, toutes mesures législatives ou réglementaires relatives à l’application des déclarations gouvernementales du 19 mars 1962 ”

[61] CE 19 octobre 1962, CANAL, ROBIN, et GODOT, Rec. 552

[62] Voir Jacques CHAPSAL “La vie politique sous la Ve République ” PUF, Collection Thémis, 1981, p.169.

[63] Idem p.185

[64] Cf.  Pierre AVRIL “la Ve République. Histoire politique et constitutionnelle. PUF, Collection droit fondamental, 1987. p 66.

[65] Idem, p. 117

[66] Gérard CONAC “Article 11” loc. cit. p. 470

[67] “ Pourquoi demander au Président de la République de s’abstenir, face au peuple français, alors que chacun s’accorde à juger que devant l’Assemblée Nationale le Premier ministre est parfaitement dans son rôle lorsqu’il engage sa responsabilité sur un texte ? ” Jean-Louis QUERMONE “ Le référendum : Essai de typologie prospective ” RDP 1985

[68] Jacques CADART op. cit. p.206

[69] Gérard CONAC “Les débats sur le référendum sous la Ve” loc. cit. p.100

[70] Guy CARCASSONNE op.. cit. p. 91

[71] Gérard CONAC Idem

[72] Cf.  Pierre ASTI “La Constitution du 4 octobre 1958 et le système politique de la Ve République ” in Jacques MOREAU “ Droit public ” Tome 1 ECONOMICA 3° édition  1995 p 196.

[73] Idem.

[74] Voir Jean GICQUEL op. cit. p. 587

[75] Lors du référendum du23 avril 1972 le oui a rassemblé 68,32% des exprimés mais l’abstention a atteint 39,76 % !

[76] Gérard CONAC op. cit. p. 478

[77] Jean GICQUEL “ Le référendum du 6 novembre 1998 ” in “ Le référendum ,Quel avenir ? sous la direction de Gérard CONAC et Didier MAUSS  STH 1990 p. 90

[78] Sur cette période voir notamment : Jean-Claude ZARKA “ Fonction présidentielle et problématique majorité présidentielle/majorité parlementaire sous la cinquième République.(1986-1992) Bibliothèque constitutionnelle et de science politique. Tome 75 LGDJ 1992.

[79] Déclaration de François MITTERRAND du 4 novembre 1988 reproduite dans le Monde du 6 novembre 1988.

[80] Voir Gérard CONAC “L’article 11 ” loc cit p. 501.

[81] Voir Francis HAMON “ L’extension du référendum ” loc cit p. 119

[82] Sur l’opposition logique majoritaire/logique de rassemblement voir Serge SUR “Un bilan du référendum en France ” RDP 1985 p. 596

[83] “ l’article 11 est moins un cadre de décision, d’exercice du pouvoir normatif pour le peuple qu’un moyen de trancher les conflits opposant les représentants de l’Exécutif et du législatif ” Bernard BRANCHET “L’article 11 et le respect de la Constitution de 1958” RDP 1990 p 1732

 

 


 

 

 

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